« L’enfant de trois ans bouge tout le temps, tombant souvent en courant, touchant à tout ; l’enfant de neuf ans marche, sans plus éprouver le besoin de se traîner par terre ni de s’accrocher à tous les objets qu’il rencontre ».  Mais pourquoi le jeune enfant bouge-t-il tant ? Mais encore, que construit-il en lui par ce mouvement continuel (et incoordonné) ?

La recherche de l’équilibre

Les jambes de l’enfant en bas âge occupent une proportion plus petite de son corps que celles de l’adulte. Il a donc besoin de faire de grands efforts pour trouver l’équilibre. Il lui est d’ailleurs plus facile de trouver son équilibre en courant qu’en marchant. De sucroît, pour se reposer, l’enfant en bas âge aime s’étendre par terre car il a une base d’appui plus vaste que sur une chaise.

Le mouvement développe la volonté

Alors que grâce au mouvement »l’idée devient action », seule la volonté permet le mouvement. Aussi, la coordination s’obtient après force de répétitions volontaires de mouvements. De même, un mouvement raffiné est le fruit de l’opposition de deux masses musculaires allant en sens inverse. Tandis que la justesse d’un mouvement résulte d’un phénomène dont l’homme entraîné n’est plus conscient, cette compétence demande de nombreux entraînements et une grande volonté. « C’est par le mouvement que la volonté se répand dans chaque fibre et se réalise ».

Le mouvement développe l’intelligence

Le centre du système nerveux est le cerveau. Chacun de nos muscles est en effet relié à notre cerveau. Ainsi, à chaque fois que nous faisons un mouvement, nous musclons notre cerveau.

A vrai dire, grâce au mouvement nous comprenons ce dont nous sommes capables mais aussi nos potentialités. Ainsi, nous pouvons choisir une solution existante ou imaginer de nouvelles solutions. Aussi nous avons la possibilité de conceptualiser une idée car « les idées abstraites elles-mêmes naissent du contact avec la réalité ». Tout cela constitue essentiellement l’intelligence. De même, grâce à l’intelligence nous pouvons effectuer des mouvements. Le mouvement est par conséquent l‘expression de la vie psychique. C’est pourquoi mouvement et intelligence sont liés dans un cycle infini.

Le mouvement développe la sociabilité

Tout d’abord, c’est grâce au mouvement que l’être humain peut avoir une relation aux autres. Il peut en effet communiquer, se mouvoir, travailler, contribuer grâce aux mouvements de son corps. « La société est fondée sur le but utile du mouvement direct ; l’individu agit au sein de la société pour atteindre ce but à la fois individuel et social. »

Le développement de la main permet la civilisation

Si le jeune enfant touche à tout, ce n’est pas un hasard. En réalité, la liberté de la main est l’une des caractéristiques de l’homme. Elle a permis l’extrême finesse des travaux indiens ainsi que les antiquités égyptiennes et les enluminures. Elle permet donc le travail, l’art, la matérialisation de la vie intellectuelle par l’écriture, mais aussi l’esthétique, les codes sociaux, la civilisation.

C’est pourquoi l’enfant touche à tout pour exercer sa main. Il construit en fait son bien-être. Cependant, nous, adultes, sommes souvent tentés de défendre nos objets, de faire preuve « d’avarice envers l’enfant ». Mais au contraire, c’est justement la manipulation de nos objets qui lui permettent de construire sa santé psychique, de se développer et de devenir un homme. Il semblerait que le secret de la résolution du conflit soit « la préparation du milieu » environnant l’enfant.

Exemples d’exercices de vie pratique permettant d’exercer le mouvement au service de l’intelligence

Tout d’abord s’habiller, se déshabiller. Puis, mettre le couvert, débarrasser la table, la nettoyer, faire la vaisselle. Ensuite, nettoyer les vitres, balayer, nettoyer le sol. De même ranger, cirer ses chaussures. Transporter des meubles. Mais encore ouvrir et fermer les rideaux, des tiroirs, des portes, des serrures, des fenêtres. Trier le linge, le plier. Repasser. Jardiner.

Tous ces exercices ont un but attrayant pour l’enfant et utile pour la communauté. Ils sont donc au service de l’intelligence.

Tout bien pesé, la plupart de ces exercices peuvent être présentés aux enfants dès la marche assurée acquise. Alors qu’au début le mouvement sera incoordonné, il se perfectionnera petit à petit. En fait, l’important est de laisser l’enfant aller au bout de sa tâche sans l’interrompre ni lui faire part de ses erreurs ou manquements. Néanmoins, si l’on constate que le mouvement utilisé est gênant (par exemple une porte claquée trop violemment), il suffit de trouver un moment adéquat pour lui remontrer comment faire. Alors,  l’enfant s’autocorrigera petit à petit.